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La
chute de Napoléon Ier en 1815 après
la bataille de Waterloo marque la fin de l'épisode
révolutionnaire en Europe. 1815 marque aussi
selon moi la fin d'une époque, d'un monde : les
Temps Modernes qui avait vu le jour en Europe avec la
Renaissance. La Révolution française et
l'épisode napoléonien qui s'ensuivit ne
sont que le prolongement dans les faits et par les actes
du Siècle des Lumières. Cet épisode
de l'histoire européenne marque la fin d'un monde
: celui des rois, de l'absolutisme et des féodalités
aristocratiques. Plus rien ne sera jamais comme avant.
L'Europe entre dans l'ère des nations et des
peuples.
Peu de contemporains ont perçu ce changement
d'époque puisque lors du Congrès de Vienne
qui remodèle l'Europe, Metternich prétend
revenir à l'ordre ancien. Or la Révolution
française, malgré les guerres et les morts
qu'elle a provoqués sur le continent européen,
a été aussi et avant tout l'instrument
de la libération des peuples et a permis l'éclosion
d'un nouveau concept : la nation. Concept né
de la Révolution française qu'elle a ensuite
exporté en Europe et qui s'est ensuite retourné
contre elle puisque après avoir réussi
à forger ce concept parmi les peuples conquis,
ces derniers l'ont repris à leur compte pour
soulever les nations espagnoles ou allemandes contre
l'oppresseur français. Les rois d'après
1815 ne purent plus jamais enfermer les peuples en cage.
La première partie de cette période qui
s'étend de 1815 au printemps
des nations de 1848 voit donc les puissants tenter
de remettre en place l'ordre ancien à travers
ce que l'on appellera la Restauration. Pourtant très
vite l'édifice bâti par le Congrès
de Vienne commence à se fissurer. En effet, à
peine plus de cinq ans après ce congrès,
les peuples étouffent et font apparaître
les premiers mouvements nationaux et libéraux
que ce soit en Espagne, en Italie, en Grèce,
en Belgique ou en Amérique latine. Ce réveil
des nations ne sera pas partout marqué de succès,
loin de là même. La Restauration est dure
et féroce. Mais ces mouvements ne sont que les
prémices de victoires futures.
Ces victoires viendront dans un deuxième temps.
Celui du triomphe des nations sur l'ordre ancien entre
les révolutions de 1848 et le
Congrès de Berlin de 1878. Cette période,
même si elle laisse encore une impression d'Ancien
Régime, bouleverse complètement les données
issues du Congrès de Vienne. Deux vieilles nations
voient enfin leur existence reconnue au grand jour et
modifient à tout jamais les rapports de force
sur le continent européen surtout en ce qui concerne
la création de l'Empire allemand. Puisqu'à
partir de maintenant ce n'est plus la France qui est
perçue comme la puissance la plus menaçante,
mais l'Allemagne. Et les sytèmes d'alliance imaginés
par Bismarck pour faire croire le contraire ne pourront
rien y changer.
Cette vision bien qu'un peu trop européo-centriste
n'est pas non plus une aberration historique. En effet
à l'époque l'Europe domine le monde et
considère ce dernier comme un vaste champ à
labourer et à exploiter à son seul profit.
La situation étant plus ou moins figée
en Europe après le Congrès
de Berlin et ce jusqu'en 1914, les gouvernements
vont trouver dans l'impérialisme colonial un
dérivatif aux ambitions nationales et un moyen
d'asseoir leur nouvelle puissance grâce à
l'autre fait marquant de ce XIXe siécle
européen ; le formidable boom économique
et démographique que connaît le continent
à cette époque. Cette période marquera
l'apogée de l'Europe dans l'histoire mondiale. |